A Naples, à la fin du XIXème siècle, on construit le plus grand passage couvert d'Europe. Le chant du cygne du genre. C'est à partir de 1820 qu'apparaissent les passages couverts qui vont, dès lors, se multiplier en Europe. Il s'agit de créer au coeur des villes des espaces protégés répondant à deux objectifs : percer de nouvelles rues exclusivement piétonnes pour désengorger l'ancien tissu et offrir au commerce de détail un lieu ouvert à tous. La Galleria Umberto 1er, conçue par Emmanuele Rocco, appartient à la dernière génération de "passages". Sa création, après la terrible épidémie de choléra qui a ravagé l'Italie en 1884, symbolise, pour Naples, la modernité et le progrès. Une occasion de rivaliser avec Milan qui a inauguré la mode des passages monumentaux. Le projet est de mettre en place un quartier luxueux et autonome, fonctionnant comme une ville miniature avec ses appartements, ses cafés-restaurants, son théâtre. La galerie ne parviendra jamais à s'imposer comme cette enclave de luxe dont rêvaient ses promoteurs. Les appartements, inadaptés au climat napolitain, se vendront mal. Ils seront progressivement occupés par des ateliers et des bureaux, tandis que le théâtre du sous-sol deviendra un cinéma de quartier, puis un cinéma porno avant de fermer définitivement dans les années cinquante. Pourtant le projet est une formidable réussite. Il n'est pas de lieu à Naples dans lequel les napolitains de toutes les couches sociales se reconnaissent mieux que dans cette galerie aux airs de palais renaissance, mâtiné d'arc de triomphe romain.