Alors que des millions de personnes affluent vers les villes asiatiques, un nouvel urbanisme, inévitable et vital, se profile. Au Japon et en Chine, certaines mégapoles s’imposent comme des chefs-d’œuvre d’empilement d’espaces de vie, de travail et de circulation, alors que leur population a explosé en vingt ou trente ans, pour atteindre parfois plusieurs dizaines de millions d’habitants. Un phénomène sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Comment loger ces nouveaux arrivants et articuler paysages et urbanisme ? Les mégapoles chinoises n’ont pas le temps de grandir naturellement comme les villes européennes. Pour conserver un certain équilibre, elles doivent inventer un modèle urbain inédit, ouvrir une troisième voie entre Manhattan et les architectures européennes. En Asie, une nouvelle ville émerge.
Comment redonner tout son sens à la notion de paysage urbain, sans abandonner l’indispensable verticalité ? Tokyo est une capitale à la concentration extrême, un véritable patchwork de bâtiments et d’axes routiers où se massent des foules de passants. Difficile de trouver un coin de nature ou de calme à moins d’une heure de train. Pourtant, la tendance en urbanisme se remet résolument au vert : au Japon comme en Chine, on a vu se développer récemment une architecture qui fait la part belle au paysage, pour l’intégrer à nouveau dans le tissu urbain. Pour preuve, on se penchera sur des projets innovants comme le musée d’art moderne de Yokosuka, conçu par l’architecte japonais Riken Yamamoto, ou encore le complexe d’habitation Fake Hills du chinois Ma Yansong, spécialiste des formes d’inspiration organique.
Hongkong est la mère de toutes les mégalopoles asiatiques : c’est là que l’urbanisation a pris son envol dans les années 1960. Poussées par l’exode rural, des millions de personnes ont afflué dans cette métropole côtière, qui a gagné rapidement en verticalité. D'une densité record – plus de 6 000 habitants au km² aujourd'hui –, la cité s'efforce de rester "humaine" et recherche aujourd'hui de nouveaux lieux de sociabilité, de loisir et de culture. On observe également cette tendance dans de nombreuses cités chinoises où surgissent musées et institutions : des bâtiments spectaculaires qui donnent un nouveau visage aux villes. On découvre ainsi le magnifique OCT Design Museum de Shenzhen, le centre de conférence international de Dalian, ou encore le musée d’histoire de Ningbo, chef-d’œuvre de l’architecte Wang Shu.
La ville d’Ordos, en Mongolie-Intérieure, est un cas emblématique de ville-dortoir, sortie de terre au milieu du désert. Son musée d’art, conçu par l’architecte Xu Tiantian, doit devenir le cœur de cette nouvelle métropole – un bâtiment qui se veut le modèle miniature du projet urbain global. Une réalisation semblable est en cours à Lingang, pilotée par un bureau d’architectes allemand. À Ningbo, ville portuaire du nord-est de la province du Zhejiang, de nouveaux quartiers voient le jour sans s’inscrire dans une planification municipale, laissant carte blanche aux architectes pour un résultat étonnant. Dans la même ville, les Vertical Courtyard Apartments de Wang Shu offrent un autre exemple de cette volonté d’ériger des "villes nouvelles" à la mode asiatique.