À 12 ans, Mehdi Faveris-Essadi plonge avec délice dans les vinyles de son père fan de soul, rock et de disco, et s'imprègne, par sa mère et sa famille tunisienne, de musique orientale. En vrai geek, il compose déjà dans sa chambre sur un sampler qu’il bricole lui-même, lorsqu’il rencontre son complice Kery James. Ensemble, Mehdi et Kery James forment Ideal J, groupe hip-hop marqueur d’une nouvelle ère, qui les propulsera d'une chambre d’ado à l’avant-garde du hip-hop français. Si les aînés MC Solaar, IAM et NTM signent des contrats chez les majors, dans une scène tout juste émergente en France, Ideal J doit trouver son chemin, à l’ombre du show business, pour pouvoir imposer leur proposition artistique : les récits poétiques sur la réalité du quotidien des enfants dans les cités de France.
Le collectif Mafia K’1 Fry, dont Ideal J constitue le pilier, ouvre le chapitre de la maturité, avec à sa tête Kery James et DJ Mehdi. Tandis qu’il compose pour sept formations artistiques à la fois (Ideal J, Différent Teep, 113, Rohff, Intouchable, OGB et Karlito), DJ Mehdi voit grand et signe avec Kery James l’iconique album Le combat continue qui raconte la rue et la réalité non filtrée des banlieues françaises, avec l'emblématique titre "Hardcore". Alors qu’Ideal J s’apprête à jouer un concert mémorable à l’Élysée Montmartre, le collectif est fauché par l’assassinat d’un des leurs. Profondément impacté par cette perte, Kery James décide d’arrêter le rap.
En parallèle de l’itinéraire musical qu’il menait jusque-là avec Kery James, la curiosité et l’oreille de DJ Mehdi lui font découvrir la scène électro française par l'intermédiaire du duo Cassius, grâce auxquels il compose pour MC Solaar. À l’heure de l’explosion de la "French Touch", DJ Mehdi rencontre Pedro Winter (alors manager des Daft Punk), qui contribue à lui ouvrir les portes de l’élitiste milieu house et électro. Dés lors, l'éclectique DJ crée son propre label indépendant, "Espionnage", à travers lequel il continue d’explorer les différences et les similiarités entre hip-hop et électro. Il plante ainsi les premières graines de ce qui allait de venir un des albums les plus importants de l’histoire du rap français : Les princes de la ville, de 113, qui se hissera bientôt au top des charts nationaux.
Manifeste joyeux de l’art du sampling, du brassage culturel et de la rime, Les Princes de la ville de 113 devient la bande-son d’une génération. L’irrésistible "Tonton du bled" renverse les tables et fédère la France entière. Disque innovant et ambitieux, cet album teinté de musique électronique s’écoule à près d’un million d’exemplaires et remporte en 2000 deux Victoires de la musique dans la catégorie "rap, reggae ou groove" et le groupe est sacré "Révélation de l’année".
Après le succès de leur précédent disque, les membres de 113 sont en panne d’inspiration. DJ Mehdi propose alors de faire appel à Thomas Bangalter de Daft Punk pour le titre éponyme de l’album 113 Fout la merde : une collaboration inédite, à l’heure où le duo anonyme refuse les sollicitations de Madonna, Janet Jackson ou encore Björk. Au fil de ses collaborations avec Diam’s, alors jeune rappeuse prometteuse, ou M, DJ Mehdi, fan des Beatles et de Bob Dylan, éprouve le besoin de mêler tous les univers qui l’inspirent, pour ne surtout pas se répéter. Mais, quand la Mafia K’1 Fry enregistre La cerise sur le ghetto, le premier album du collectif mythique, DJ Mehdi s’abstient d’en être : une défection que la bande vit comme une trahison, tandis que Mehdi, lui, traverse une période compliquée de doutes, avant de reprendre sa quête de sons futuristes.
En 2003, Pedro Winter crée le label Ed Banger Records, dont le nom est une trouvaille de Mehdi, fin conseiller artistique. A l’heure où les Strokes martèlent un rock entêtant, la French Touch pâlit. Les deux amis accompagnés de So-Me, directeur artistique du label, proposent une nouvelle couleur musicale dans le sillage de Justice et de nombreux talents. Avec "Signatune" et son mémorable riff, tube de son album Lucky Boy, Mehdi entame une carrière solo : raves et clubs internationaux s’arrachent le DJ qui fait l'hunanimité partout où il joue. Avec son homologue britannique Riton, il se lance dans une ultime aventure au sein de leur duo Carte blanche.