1993, procès de Jean-Marie Villemin. Parmi les témoins, Laurence Lacour se souvient : neuf ans plus tôt, 1984, le 16 octobre... Le corps du petit Grégory, 4 ans, est repêché dans la Vologne. Son enlèvement avait été revendiqué quelques heures plus tôt par un appel anonyme du corbeau qui sévit depuis plusieurs mois et tyrannise la famille Villemin. Une vengeance abominable, dont l'auteur comme le mobile sont une énigme qui secoue la France entière. Les médias affluent sur les lieux du crime. Les parents du petit garçon, Christine et Jean-Marie Villemin, effondrés, subissent une pression effrayante, pendant que le jeune et inexpérimenté juge Bertrand mène l'enquête... Un suspect est bientôt identifié par les experts en écriture, qui ont examiné les lettres anonymes ayant précédé le meurtre : il s'agit d'un certain Bernard Longuet, un cousin de Jean-Marie Villemin. Interrogée par les gendarmes, la belle-soeur de Longuet, Brigitte Keller, l'accuse...
La garde à vue de Bernard Longuet expire. Cependant, Brigitte Keller réitère ses accusations devant le juge. C'est sur cette base que Longuet est arrêté le 2 novembre 1984. Mais Brigitte revient dès le lendemain sur ses accusations. Le 4 février 1985, Longuet est libéré grâce à ses avocats, maître Schulmann et maître Lafargue, qui découvrent des failles dans la procédure menée par le juge Bertrand. Dès lors, les soupçons commencent à s'orienter vers Christine Villemin, la mère du petit Grégory, abondamment relayés et amplifiés par la presse. Jean-Marie et Christine Villemin, représentés par maître Bourgoin, avocat réputé, sont de plus en plusisolés...
Bernard Longuet reprend son travail à l'usine. Sous l'influence de la presse, la rumeur enfle. Elle accuse Christine Villemin d'être, non seulement le corbeau, mais aussi l'infanticide. Trois femmes de l'usine où elle travaille témoignent l'avoir vue poster une lettre la veille du crime, ce qu'elle conteste... Révoltés par ces accusations mais également incités par certains de leurs proches, Christine et Jean-Marie Villemin décident de se faire justice eux-mêmes. Un journaliste proche du couple, pris d'angoisse, les en empêche au dernier moment. Christine découvre qu'elle est enceinte. Le 25 mars 1985, de nouveaux experts en écriture la désignent comme le corbeau. Devant ce nouveau coup, elle est prise de saignements et doit être hospitalisée. Le 29 mars, livré à lui-même et fou de douleur, Jean-Marie Villemin se rend au domicile de Bernard Longuet et, sous les yeux de sa femme, le tue d'un coup de fusil de chasse...
Après une brève et dramatique visite à sa femme, Jean-Marie Villemin se constitue prisonnier. Entre-temps, les gendarmes ont été dessaisis de l'enquête. C'est le SRPJ de Nancy qui la reprend, sous la direction du commissaire Colonna, persuadé de la culpabilité de Christine Villemin. En prison, Jean-Marie communique avec Christine par lettres. L'enfant à naître est tout ce qui leur reste d'espoir ! Les médias se déchaînent, la désignant désormais ouvertement comme un monstre. Le point culminant est atteint avec le célèbre article de Marguerite Duras sur Christine Villemin, "Sublime, forcément sublime". Seuls ou presque, Laurence Lacour et René Cauvin du Républicain Lorrain, persistent à croire en son innocence. Après une perquisition dans l'ancienne maison des Villemin, vide depuis des mois, le commissaire Colonna et ses hommes découvrent des cordelettes semblables à celles qui ligotaient l'enfant assassiné.
Christine Villemin est inculpée par le juge Bertrand et emprisonnée à Metz. Jean-Marie, transféré à Nancy, apprend cette arrestation avec désespoir. Christine, à son tour, découvre la prison, mais elle est remise en liberté, le 16 juillet 1985, et placée sous contrôle judiciaire. L'instruction piétine et s'enlise. Le 30 septembre, Christine Villemin accouche d'un garçon, Julien. Maître Bourgoin, dans une tentative maladroite pour contrecarrer la campagne contre sa cliente - et aussi payer ses frais, médiatise largement la naissance de cet enfant, ce qui se révèle désastreux pour l'image de la jeune femme dans l'opinion. Entre-temps, Christine Villemin est renvoyée devant la Cour d'assises. Harcelée, à bout, elle craque et tente de se suicider. De l'avis général, elle risque d'en prendre pour vingt ans...
C'est le juge François, président de la chambre d'accusation de Dijon, qui, en octobre 1987, reprend le dossier. Bien que malade, il décide de repousser sa retraite pour reprendre l'enquête à zéro. Mais nous sommes trois ans après les faits, Longuet est mort et les différentes parties campent sur leurs positions. Néanmoins, patiemment, en se tenant à l'écart des médias, le juge François reprend le fil de l'affaire. Il "apprivoise" le couple Villemin, figé dans sa révolte et sa souffrance. Peu à peu, son enquête semble déboucher sur des hypothèses cohérentes et des pistes possibles. Tout est en place pour un non-lieu en faveur de Christine Villemin. Le juge François la place devant un choix douloureux : se contenter d'un non-lieu qui va l'innocenter et demander la fermeture du dossier, ou continuer l'enquête sur la mort de son enfant. Sans hésiter, Christine et Jean-Marie Villemin demandent la poursuite de l'enquête...